Ho! Ho! Ho!

 

(Texte publié originellement le 24 décembre 2007)

Cette année, en décembre 2007, le plus sympathique Père Noël a été touché par les gens de Limoilou…

Qu’il est beau ce mois de décembre qui vient de passer ! J’ai bien dit qu’il est, et non pas qu’il était, parce que pour moi, il demeure, il persiste et il reste et ne passera pas.

Pour la première fois de ma vie, j’ai revêtu la personnalité du Père Noël dans un centre commercial, et croyez-moi, revêtir le Père Noël c’est autrement plus que de mettre un costume rouge, des bottes et une barbe blanche. J’ai donc eu le privilège de faire mon baptême père-noélien dans le quartier le plus riche de la ville de Québec : Limoilou ! Plus précisément, j’étais aux Galeries Charlesbourg, sur la 1ère Avenue, angle de la 41e Rue, et lorsque je dis que c’est un quartier riche, il s’agit d’une richesse insoupçonnée : une richesse humaine si immense que je n’ai jamais rien vu de tel dans ma vie.

Dès mon premier jour de travail, je fus pour ainsi dire placé devant une réalité que je ne connaissais guère, celle des handicapés intellectuels adultes. En effet, des hommes et des femmes avec un corps de plus de quarante ans, mais avec le coeur et le caractère d’un enfant, sont passés devant le royaume du Père Noël Serge. Un seul croisement de regard aura suffi pour établir le premier lien et voilà que près de moi, voulant s’asseoir sur les genoux du Père Noël, ils sont venus les uns et les autres afin de demander au Père Noël «un petit tracteur pour jouer dans le sable» ou «un vrai minou qui fait miaou-miaou» ou encore «un disque de musique de Noël drôle» !

Il m’est impossible d’écrire avec des mots à quel point ces enfants sont touchants et authentiques. Je vois encore dans mes souvenirs les yeux des parents de ces enfants et leur façon discrète de me dire «merci», comme si ce que j’avais fait était extraordinaire. Certains d’entre eux sont venus me voir à plusieurs reprises, et je me demande en ce moment même qui a le plus profité de cette relation d’amour qui s’est installée le temps d’une série de courts instants…?

Une autre belle relation s’est aussi établie entre le Père Noël et les personnes âgées. J’ai tout d’abord été frappé par l’ampleur du phénomène de la solitude des aînés. Ces hommes et ces femmes qui ont construit, qui ont trimé dur, qui ont eu souvent une vie remplie et qui soudainement se retrouvent seuls dans la vie. Je n’ai pas mené d’enquête sur les raisons de leur solitude, bien que, dans certains cas, le Père Noël ait reçu des confidences. Il s’agit simplement de constater que la solitude des aînés n’est pas simplement une histoire dont on entend parler à la radio une fois par année lors de la guignolée des médias. La solitude des aînés est un fait indéniable que je reconnais pleinement depuis le 6 décembre 2007.

Plusieurs de ces aînés ont un trop plein d’amour à donner tout en ayant le coeur “dans le rouge” parce qu’ils n’en reçoivent plus. Je cite l’exemple d’une femme qui n’a pas mangé de ragoût maison depuis une dizaine d’années parce qu’elle souffre d’un handicap des mains, qu’elle ne peut plus cuisiner et que personne de son entourage ne veut lui en faire. Je cite l’exemple d’hommes et de femmes qui n’ont pas eu d’accolade ou qui n’ont pas eu de bras pour les serrer un peu depuis de nombreuses années. J’ai été confronté à cette situation parce que moi, c’est dans ma nature de faire des “gros colleux” et que certaines personnes fondaient littéralement en larmes lorsque le Père Noël se levait de sa chaise pour aller leur dire bonjour et les serrer dans ses bras. Le mot s’est sans doute passé parce que j’avais de plus en plus de visites de jour en jour. Les aînés venaient chercher leur “gros colleux” et leurs bisous du Père Noël et venaient se confier à ce dernier comme on se confie à un ami.

Lorsque je parle de solitude, ce n’est pas de la frime. Les deux choses qui ont été le plus demandées au Père Noël Serge sont :

1- Un ami, ou de la visite pendant les Fêtes.

2- Un conjoint, ou une conjointe.

La troisième chose concerne les enfants :

3- Que papa et maman reviennent ensemble.

Assez incroyable que ces demandes de cadeaux aient dépassé celles que mes collègues des autres centres commerciaux recevaient, en l’occurrence des consoles wii, des figurines pet-shop’s et des poupées bratz du côté des enfants et la paix dans le monde du côté des adultes.

Il n’y a pas que la solitude des aînés qui m’a frappée, il y a aussi la pauvreté et la précarité du revenu de plusieurs personnes. Je pense à cette femme qui est venue me voir en pleurant, racontant au Père Noël que son époux dans la soixantaine venait de perdre son emploi. Cette grand-mère pleurait de ne pouvoir faire de cadeaux à ses petits-enfants. J’ai écouté et j’ai simplement parlé avec mon coeur, lui faisant voir que la plus belle richesse était que ses petits-enfants allaient la voir à Noël et que le plus beau des cadeaux, c’était ça : Passer du temps avec grand-maman et grand-papa ! Plusieurs enfants n’auront jamais la chance de même connaître un jour leur grand- maman. Lorsqu’elle m’a quitté, elle riait de bon coeur ! Quelle ne fut pas ma surprise de la voir revenir à la fin de l’après-midi avec son époux ! J’ai serré fort la main de cet homme, lui ai mis l’autre main sur l’épaule et il m’a fait cadeau de son sourire, un sourire de bonheur parce que son épouse avait retrouvé le sourire ! Sans le savoir, elle qui était triste de ne pouvoir offrir des cadeaux à Noël venait de m’en faire un qui a une valeur inestimable.

En fin d’après-midi de ce 24 décembre, à 16h00 pile, beaucoup sont venus saluer le Père Noël avant qu’il ne retourne à son rôle quotidien. Je pense à celle qui voulait son dernier bisou et son gros “colleux” avant l’an prochain et qui a souhaité très fort que je sois à nouveau le Père Noël des Galeries Charlesbourg l’an prochain. Je pense à celle qui venait me donner ma tablette de chocolat à chaque jour et qui est venue chercher son sourire. Je pense enfin à ce couple extraordinaire qui venait me parler à chaque jour, deux personnes qui m’ont touché au plus profond de mon coeur. Ils m’ont dit que j’étais le Père Noël «In God we Trust». Ils ne croyaient plus, m’ont-ils précisé, au Père Noël depuis assez longtemps, ils trouvaient même que les pères Noël étaient idiots et ennuyeux et voici que soudain, ils font la rencontre du Père Noël «In God we Trust», celui du film Le miracle de la 34e rue, c’est-à-dire du seul et unique vrai Père Noël !

Le Père Noël existe donc et, me disent-ils, «c’est vous, Père Noël».

J’ai beau être grand, gros et fort, j’ai été touché et mes yeux sont devenus humides. Ce qui m’a touché encore plus, c’est que ce film est mon favori. Je le regarde à chaque année depuis sa sortie en 1994 et je l’avais vu aussi pour la première fois avec ma mère, lorsque j’étais enfant, dans la version réalisée en 1973 avec Sebastien Cabot dans le rôle du Père Noël Kris Kringle.

Si vous n’avez pas vu ce film, il vous manque quelque chose dans votre vie.

 

MV5BMTI3ODEzODA0NV5BMl5BanBnXkFtZTcwMjI1MjIyMQ@@._V1._SX334_SY475_

 

Jamais je n’aurais osé imaginer avant ce 6 décembre qu’un tel miracle se produirait dans ma vie et dans la vie de ces personnes merveilleuses que j’ai rencontrées pendant ces quelques parcelles d’éternité. Je ne raconte pas tout. L’essentiel est dit. J’ai vécu d’autres belles choses, j’ai fait le Père Noël notamment lors d’un souper populaire auquel étaient conviés les pauvres et les mals-aimés des quartiers St-Roch et Limoilou. J’ai reçu la visite aussi d’enfants autistes, d’enfants sourds et je ne peux que vous dire que le serveur qui héberge ce modeste blogue ne possède pas assez de mémoire vive pour contenir la somme de mon expérience et pour exprimer combien je suis transformé par ce que j’ai reçu.

Si certains pensent encore que le Père Noël est le symbole de la surconsommation, de Coke ou encore des folies dépensières, moi je sais maintenant que c’est bien autre chose. Je ne peux m’empêcher de penser à cette grand-mère triste parce que son fils “dans les produits naturels et dans des groupes qui veulent l’égalité et la paix dans le monde” lui a interdit d’amener ses petits-enfants au centre d’achat pour voir le Père Noël et qui a expliqué aux tout p’tits que le Père Noël est un mythe pour les esprits conditionnés par le système. J’en revenais juste pas, mais en même temps, je n’étais pas si étonné que ça puisque ce genre de discours est de plus en plus courant. Ma pensée pour ce genre d’esprit est «pauvres nous». Pauvres nous, en effet, qui nous sommes conditionnés nous-mêmes au moyen de croyances limitatives et qui nous rendons esclaves des modes émergentes et des nouveaux mouvements de masses tout aussi aliénants que ne le sont la surconsommation et l’obscurantisme. Que puis-je faire d’autre que de prier pour quelqu’un qui pense comme ça ? Et ça, c’est sans dire que l’usage abusif du mot «mythe» fait de plus en plus de ravage dans notre société post-moderne autosuffisante (et combien ignorante aussi…)

Je m’arrête là dessus parce que je veux revenir sur ce sujet d’ici quelques jours et je vous parlerai aussi du Père Noël et des accommodements raisonnables ! Bien oui, j’ai vécu des choses fort étonnantes dans ce domaine aussi…

Joyeux Noël à tous et sachez que la plus belle richesse est d’être avec ceux qui vous aiment et que vous aimez pendant cette période des Fêtes !

DSCN2557

Père Noël Serge

 

  One Response to “Ho! Ho! Ho!”

  1. Je vivais ces situations lorsque j’étais technicien-ambulancier. C’est ce qui me manque depuis puisque je suis devenu asocial du à ma lésion professionnelle. J’ai tenté et je tente toujours de regrouper des gens pour former une famille afin de me retremper dans ce moud du rapprochement humain, de partager ne serait-ce un minimum d’écoute et ressentir même si cela demeure que du virtuel, une chaleur humaine.

    Je comprends que cela t’est touché, c’est un manque flagrant d’une société de surconsommation de pouvoir revenir à la base essentielle de la condition humaine.

    Je te souhaite de revivre cette situation ! :o)

    André

 Leave a Reply

You may use these HTML tags and attributes: <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

(required)

(required)