Jan 102015
 

Peut-on rire de Dieu ?

Ah! La grande question!

Pourquoi pas, me dis-je, puisque ce qui est l’objet de ce rire n’est pas Dieu, mais une simple représentation. Mais il faut faire attention, il s’agit de ne pas blesser volontairement. C’est la réserve que je m’impose à moi-même.

Pourquoi ?

Ça demande un mot d’explication.

Celui qui a fait une expérience de foi, pour ne pas dire une expérience de Dieu et donc qui croit pour vrai que Dieu existe, regarde bien des choses avec détachement et discernement. Ça ne fait pas de lui un être parfait et désincarné, mais un être en mouvement, ouvert à l’émerveillement et accueillant pour l’autre :

Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », et qu’il haïsse son frère,
c’est un menteur.
En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit,
ne peut pas aimer Dieu, qu’il ne voit pas. (Première lettre de Jean 4. 20)

Quel rapport avec le fait de rire de Dieu ? C’est qu’on nous a appris que Dieu a conçu l’homme et la femme afin qu’ils (les deux ensemble) lui ressemblent (Genèse 1. 26-27).

Ainsi, que l’on caricature Dieu, celui qui a la foi, ça lui glisse sur le dos.

Pourquoi ?

Simplement que ce qui est représenté n’est pas Dieu et il le sait! Il le sait parce que s’il veut voir ce qu’est vraiment Dieu, il n’a qu’à regarder l’autre dans les yeux. C’est simple, trop simple peut-être et c’est pour ça que nous compliquons tout : C’est trop simple et l’être humain ne semble pas être assez sage pour apprécier ce qui n’est pas compliqué. Il s’invente alors des simulacres et il proclamera avec conviction que Dieu, c’est ça. En fait, bien des images d’êtres divins qui circulent dans la culture populaire sont de l’ordre de la parodie et n’ont rien à voir avec Dieu. Certains alors se diront que ça n’a aucun sens et n’y croiront pas et pour être franc, je les comprends.

Pour le dire en d’autres mots, en m’inspirant de Paul (dans la première aux Corinthiens, ch. 8), moi je sais que les représentations humoristiques et satyriques d’un dieu, n’importe laquelle, ne sont que ce qu’elles sont. Elles n’ont de pouvoir sur moi que celui que je leur accorde et je ne leur en accorde aucun autre que celui de faire rire ceux et celles que ça amuse (bien qu’à certains, semble-t-il, ça fasse peur…) Ainsi, les dessins d’être divins et de prophètes, ça me laisse indifférent. Qu’on les représente alors gros, laids et mal rasés, ça ne change rien. Je ne juge pas, ni ne m’insurge contre celui qui les produit, ni contre celui que ça fait rire. Quand je deviens las de les voir, de les lire et de les entendre, je vais simplement ailleurs et je laisse entre eux ceux que ça amuse.

Mais vous savez quoi ? On m’a déjà trainé dans la boue, qualifié de sectaire et d’intolérant parce que j’avais laissé des railleurs entre eux! Ça me fait conclure la chose suivante : Quoi qu’on dise, quoi qu’on fasse, il se trouvera quelqu’un à qui ça va déplaire. Mais ça, c’est une autre histoire.

Cela dit, si ma conscience s’élève au-dessus de la mêlée, ça ne me donne pas une licence pour choquer, insulter, provoquer et scandaliser l’autre qui n’a pas sa conscience là où est la mienne et qui n’a pas envie de rire. Je suis assez sage pour discerner et faire la part des choses.

 

 

 

  12 Responses to “L’irrévérence est-elle un don de l’Esprit ?”

  1. Charb savait-il qu’il y aurait des « dommages collatéraux » possibles (11 vies, pour être précise) ?

    Rien n’excusera le fait qu’il ait mis ces autres vies en danger de mort, sachant que lui-même était l’objet d’une menace bien réelle (la preuve, sa garde rapprochée).

    Ne vous laissez pas avoir, gardez votre esprit critique.

    Je ne suis pas Charlie.
    Je suis Madeleine.

    *******

  2. Bonjour, heureuse de votre retour…

    CAUTION !

    Ce message est censuré dans le Journal de Montréal :

    «Je n’ai jamais eu que cinq ou six conversations privées avec [lui], mais ce fut chaque fois pour l’entendre parler de religion, et je suis tout à fait sûr d’avoir été le premier à recueillir sa fameuse formule sur le XXIe siècle, que l’on déforme aussi souvent qu’on la cite. Il ne dit pas : “Le XXIe siècle sera religieux ou ne sera pas.”, mais “Le XXIe siècle sera mystique ou ne sera pas.” ce qui n’est pas tout à fait la même chose.» (ref: http://www.malraux.org/index.php/varia/663-xxie.html)

    S’il y a une chance que l’Islam se « réforme », ce serait peut-être dans sa branche appelée « Soufisme ». Cette branche aurait quelques ressemblances semble-t-il avec le christianisme, qui lui, est essentiellement « mystique ».

    Les plus grandes avancées ou réformes dans l’Église Catholique ont vu le jour grâce à Ses grands collaborateurs. En voici une de taille qui fut nommée « Docteure de l’Église » (la plus haute distinction dans l’Église Catholique) : La mystique Hildegard von Bingen (1098-1179).

    Pour une compréhension en accéléré de bien des questionnements et préjugés, je vous recommande fortement ce petit film qui retrace les grandes lignes de sa vie : aller sur Google et tapez « hildegarde film ».

    Et si vous eu avez l’intérêt de le regarder jusqu’au bout, probablement sourirez-vous de bon cœur à cette petite blague :

    https://sites.google.com/site/alainjulienlegoff/billet-d-humeur/burka2.jpg

    • Hildegarde de Bingen et aussi Ste-Gertrude de Helfta, ces femmes inspiré qui ont transmis un souffle à la mystique rhénane et notamment Maître Eckhart.

      http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/gertrude/index.htm

      • C’est sûr, après on a pu philosopher et s’échauffer l’esprit, mais suite à cela je crois qu’il est important d’éviter la tentation de créer des mouvements parallèles.

        Au sujet du Soufisme dans l’Islam, il me semblerait incorrect de le comparer à un mouvement parallèle tel que le Protestantisme chez les Chrétiens par exemple. Car dans l’Islam, il n’y aucune structure unifiée comparable au Catholicisme et à l’Orthodoxie.

        Les Soufis dans l’Islam seraient plus, à mon sens, comparables à nos moines et nos sœurs… mais voilà : ils n’ont pas de clergé directeur.

        Q’en dites-vous Monsieur Cazelais, je m’adresse à l’historien chrétien et je lui suggère un nouveau billet sur ce sujet de l’heure quand il aura le temps. 🙂

        Merci bien

        • En attendant, je vous invite à écouter notre émission “Sur les rives de l’Outaouais” ce soir mardi le 13 janvier 2015 à 23h30 (en reprise jeudi le 15 janvier à 19h) sur l’ensemble du réseau Radio VM. Mon collègue Pierrot Lambert s’entretien avec Jonathan Blais, détenteur d’une M.A. en études de conflits de l’Université St-Paul, catholique, croyant et activement engagé dans le dialogue inter religieux avec des musulmans et étudiant du soufisme (tient donc!) M. Blais s’est inscrit à un programme à l’Institut Catholique de Paris en dialogue des cultures et des religions et s’est envolé vers Paris, d’où il fera un stage sur le terrain au Maroc.

          Cette émission a été enregistrée en décembre 2014, donc bien avant la fusillade de Paris.

          Je viendrai mettre un lien mercredi en soirée afin d’écouter cette émission en ligne.

  3. je suis ému de te lire et tout à fait d’accord avec ce que tu écris ici.

  4. Ci-dessous, un article édifiant qui va « enfin » dans le sens de ce que j’écrivais plus haut dans mon commentaire. A lire jusqu’au bout (caricatures comprises), tant c’est l’analyse « juste » que tout le monde préfère taire:

    http://www.europe1.fr/medias/charlie-hebdo-je-t-en-veux-vraiment-charb-2344979

    *******

    • Bonjour Madeleine,

      Je ne suis pas Charlie moi non plus. 🙂
      Toutefois s’il est quelque chose que j’ai compris, c’est que l’homme sans humour n’est pas encore sur le chemin de la Sagesse…

      Celui qui a signé l’article que vous avez présenté est en plein « processus de deuil » de ses amis décédés; et parmi les étapes du deuil il y a : « la colère » (qui vient juste après le gros chagrin).

      Alors, peut-être trouverez-vous davantage écho à votre opinion dans ce propos qui me semble plus équilibré :

      *******************************************

      «Être ou ne pas être Charlie, telle est la question qui a fortement tourmenté une partie des journalistes d’Al Jazeera. Si on en croit les mails récemment échangés entre les différents collaborateurs anglophones de la chaîne qatarie, tous les journalistes de la rédaction n’ont pas le même avis quant au soutien à afficher au journal satirique français Charlie Hebdo.

      Comme le rapporte France 24, tout est parti d’un simple mail envoyé par Salah-Aldeen Khadr, directeur de la rédaction d’Al Jazeera à Londres, à l’ensemble de sa rédaction. Dans son message, celui-ci souhaitait donner quelques conseils à ses journalistes dans le but de couvrir au mieux les événements tragiques qui secouent la France depuis le 7 janvier. Jugeant le slogan Je suis Charlie trop «aliénant», Salah-Aldeen Khadr invitait ses équipes à ne pas présenter cette actualité comme une «attaque contre la liberté d’expression», mais comme «un affrontement entre deux franges extrémistes».

      Dans son message, le directeur de la rédaction poursuivait: «Défendre la liberté d’expression face à l’oppression est une chose, revendiquer le droit d’être odieux et offensant juste parce que vous le pouvez est infantile. Provoquer les extrémistes n’est pas un geste courageux, si votre manière de le faire offense des millions de gens modérés. Et dans un climat où la réponse violente – bien qu’illégitime – est un risque réel, adopter une telle posture sur un principe que pratiquement personne ne conteste est pire qu’inutile: c’est inutilement une question d’ego.»

  5. Quel est le thème musical utilisé pour Aux premiers temps de la chrétienté ? Merci

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