Avec des contributions de Serge Cazelais, Francis Daoust, Anne Létourneau et Hervé Tremblay.
Je signe les trois chapitres suivants :
“Jésus était-il marié?”, p. 175-196.
“L’Église a-t-elle retiré des livres de la Bible?”, p. 197-216.
“Que s’est-il passé autour du tombeau de Jésus?”, p. 217-232.
J’ai moi-même eu toute une surprise en parcourant l’introduction. Voici comment l’éditeur me présente :
«Serge Cazelais enseigne l’histoire des religions à l’Université Saint-Paul, à Ottawa. Il a l’âme d’un enquêteur et d’un raconteur. Quand je lis les romans de Dan Brown, je vois
Serge dans la peau de Robert Langdon, professeur de «symbologie»
qui suit la piste des énigmes d’une autre époque. Serge
se passionne pour l’histoire des premiers siècles de l’Église
naissante. En dialoguant avec lui, on ne peut que se laisser
entraîner dans sa passion pour les Pères de l’Église, les textes
apocryphes et les anciennes hérésies. Les articles qu’il
propose utilisent volontairement un ton plus familier pour
montrer que les études bibliques peuvent aussi se dire par
des mots de tous les jours. Serge aime déconstruire l’image
figée et monolithique de l’Église naissante pour montrer la
pluralité interprétative qui a donné vie à cette Église.
Épicurien, dans ses temps libres, Serge aime cuisiner et bien manger avec sa famille et ses amis.»
Venez me rencontrer au Salon du livre de Montréal, au kiosque de Bayard-Novalis le 17 novembre à partir de 18h! Sébastien Doane et moi nous vous signerons des autographes!
Christian Askeland présente le dossier… : «Jesus had a Sister-in-Law» (N.B. : Le titre de ce billet a été modifié suite à une controverse au sujet du mot «Ugly» présent dans le titre original)
Pour l’expliquer en quelques mots, en essayant de simplifier, le dossier scientifique publié dans le Harvard Theological Review présente une datation du soi-disant papyrus de l’épouse de Jésus en le comparant avec un fragment de l’Évangile de Jean qui fait partie du même lot, qui appartient au même vendeur-collectionneur anonyme et dont la provenance est inconnue – déjà là, nous avons quelques drapeaux rouges.
Au sujet de l’encre, l’article publié dans la revue (sous le titre «Characterization of the Chemical Nature of the Black Ink in the Manuscript of The Gospel of Jesus’s Wife through Micro-Raman Spectroscopy») est en fait un condensé de deux pages et demi d’une étude plus substantielle (de 29 pages) qui est disponible sur le site web de l’Université Harvard. Voici cette étude (vous pouvez la télécharger à partir de cette page) :
Ce qu’il y a de nouveau, ce que la communauté scientifique n’avait pas noté jusqu’ici, c’est que cet article présente des images recto-verso du fragment de papyrus de l’Évangile de Jean qui a été daté en même temps que le fragment de papyrus qui mentionne la femme de Jésus. Christian Askeland note que la graphie des deux papyrus est similaire – ce qui est normal. Mais le pot aux roses, c’est qu’il note aussi que le fragment de l’Évangile de Jean est en dialecte lycopolitain (ou subakhmimique, le dialecte numéroté L5) et qu’il présente un ordre des mots identique à une édition moderne de l’Évangile de Jean dans ce dialecte L5 édité en 1924 par Sir Herbert Thompson, The Gospel of St. John According to the Earliest Coptic Manuscript.. Voyez les images du fragment plus bas dans ce billet (mais ça prend une petite connaissance du copte pour apprécier l’affaire.)
En après-midi sur facebook, je notais (en anglais) ceci sur le babillard d’Alin Suciu :
Wow! Impressive! There is always one line skipped when we compare with Thompson’s edition! However, he wrote ebol in the fragment instead of abal in Thompson’s. Well, seems that C. Askeland find something big!
(traduction libre – puisque je me cite : Wow! Impressionnant! Le fragment présente toujours le texte avec un saut d’une ligne par rapport à l’édition de Thompson. Je note une différence, il a écrit ebol plutôt que abal. Christian Askeland semble avoir trouvé quelque chose d’important!)
Alin Suciu a publié quelques minutes après cette image qui le démontre clairement :
Statistically, the chances for such a fragment to harmonize consistently with a line skip compared with Thompson’s edition are minimal. I made what you did, but with fragment A and the concordances are the same!
(traduction libre – puisque je me cite : Statistiquement, les chances sont faibles qu’un fragment puisse s’harmoniser avec autant de précision, avec un texte qui présente systématiquement un saut d’une ligne par rapport à l’édition de Thompson. J’ai fait la même chose que toi, mais avec le fragment A et j’arrive au même résultat!)
** Addendum 25 avril 2014 : Si vous voulez suivre le fil de discussion associé à cette image, sur le babillard facebook d’Alin Suciu, suivez ce lien (j’espère que ça marche, c’est la première fois que je mets un lien fb sur mon blog)**
** Addendum 26 avril 2014 : Voici l’image du côté A du fragment illustrant la concordance avec l’édition de Thompson (crédit Mark Goodacre)**
L’histoire n’est pas finie, j’en suis convaincu…
**
Post Scriptum
Pour le bénéfice des lecteurs, je répète ce que je dis sur mes autres billets depuis 2012 : Un texte qui mentionnerait une épouse du Christ n’aurait rien pour ébranler quoi que ce soit (nous ne sommes pas dans le Da Vinci Code tout de même!) Cela dit, je suis toujours convaincu que le papyrus est un faux, un faux qui ne sert qu’à polluer la recherche historique et la réflexion théologique contemporaine.
Si le papyrus s’avérait authentique, je le placerais bien plus du côté du symbolisme nuptial inspiré du Cantique des cantiques, comme on le lit dans l’Apocalypse de Jean, plutôt que du statu matrimonial de Jésus. (ici et ici)
Alors je vis un ciel nouveau et une terre nouvelle, car le premier ciel et la première terre ont disparu et la mer n’est plus.
Et la cité sainte, la Jérusalem nouvelle, je la vis qui descendait du ciel, d’auprès de Dieu, comme une épouse qui s’est parée pour son époux. (Apocalypse de Jean 21. 1-2)
Alors l’un des sept anges qui tenaient les sept coupes pleines des sept derniers fléaux vint m’adresser la parole et me dit :
Viens, je te montrerai la fiancée, l’épouse de l’agneau. (Apocalypse de Jean 21. 9)
L’Esprit et l’épouse disent : Viens !
Que celui qui entend dise : Viens !
Que celui qui a soif vienne,
Que celui qui le veut reçoive de l’eau vive, gratuitement. (Apocalypse de Jean 22. 17)
Cela dit, le concept d’épouse du Christ est quelque chose de bien documentable dans la littérature spirituelle patristique. Mais ça ne signifie pas qu’il s’agisse d’un mariage dans le monde matériel, si je puis le dire ainsi. C’est comme le baiser sur la bouche que Jésus donne à Marie Madeleine dans l’Évangile de Philippe (un des pivot du Da Vinci Code et du livre Holy Blood and the Holy Grail). Ce baiser est le signe, ou le processus du transfert de l’Esprit et de la naissance spirituelle. On cite souvent en effet le logion 55 de l’Évangile de Philippe (les mots et les lettres entre crochets indiquent que l’éditeur les a restitués par une conjecture) :
(55) La Sagesse qu’on appelle « la stérile » est la mère [des] anges et [la] compagne du S[auveur].
[Quant à Ma]rie Ma[de]leine, le S[auveur l’aimait] plus que [tous] les disci[ples et il] l’embrassait sur la [bouche sou]vent. Le reste des [disciples] [ . . ] . . . . . [ . ] . [ . . ] . . ils lui dirent : « Pourquoi l’aimes-tu plus que nous tous ? » Le Sauveur répondit et leur dit { } « Pourquoi ne vous aimé-je pas comme elle ? »
Mais on mentionne beaucoup plus rarement ce qui vient avant dans le texte et qui constitue la clé herméneutique, les logia 30 et 31 (j’ajoute les caractères gras) :
(30) Tous ceux qui sont engendrés dans le monde c’est par la nature qu’ils sont engendrés, et les autres, c’est [d’où] ils sont engendrés qu’ils se nour[rissent]. L’homme, c’est de la [pro]messe qu’il re[çoit sa nourri]ture, en [vue du li]eu d’en haut. [S’il . . . . ] lui de la bouche – [d’où] provient la parole -, alors il serait nourri par (ce qui provient de) la bouche et il deviendrait parfait.
(31) En effet, les parfaits, c’est par un baiser qu’ils conçoivent et engendrent. C’est pourquoi nous aussi nous embrassons mutuellement et c’est par la grâce qui est en nous mutuellement que nous recevons la conception.
C’est une interprétation de la symbolique des noces dans le Cantique des cantiques («Qu’il me donne des baisers de sa bouche…») dont fait écho l’Apocalypse de Jean (les noces de l’Agneau) qui l’exprime littéralement : «L’Esprit et l’Épouse disent “Viens”» (Apocalypse 22.17). Nous (incluant les exégètes et les historiens) ne comprenons plus tellement bien ce langage qui exploite l’allégorie et la typologie. Mais c’est ainsi que les chrétiens s’exprimaient, ainsi que la branche rabbinique la plus mystique dans le judaïsme. J’ai un article sur ce sujet qui s’en va bientôt sous-presse “Husband and Wife as Spirit and Soul”.
Voici quelques nouvelles (et articles de spécialistes en plus de ceux qui sont mentionnés dans les autres billets consacrés à ce papyrus). Vous trouverez les liens à la fin de ce billet-ci, en bas de la page. C’est surtout en anglais, je vais en ajouter sur ce même billet de temps à autre. Pour ce qui est des médias, il est clair que la majorité des journalistes et pigistes n’ont lu que le communiqué de presse envoyé par l’Université Harvard et n’ont pas lu les articles scientifiques (le lien est sur mon billet précédent) pourtant publiés aussi par Harvard… Or, il y a une discordance entre la dépêche de presse et les articles!
On constate aussi du côté des théologiens, théologiennes et historiens, historiennes des religions qu’il y a ceux et celles qui y tiennent coûte que coûte (du genre, c’est authentique parce que ça cadre avec mon agenda personnel), il y a les sceptiques coûte que coûte (du genre c’est un faux parce que ça ne cadre pas avec mon agenda personnel) et ceux et celles qui discutent sérieusement (au sein desquels certains y croient, d’autres sont convaincus qu’il s’agit d’un faux et d’autres suspendent leur jugement en attendant la suite).
Je conçois que le grand public s’y perd complètement.
Pour ma part, je suis encore extrêmement sceptique, non pas parce que ça « m’ébranle ». N’oublions pas que je suis l’auteur d’un mémoire de M.A. sur le motif de l’Esprit saint comme mère de Jésus et sur la masculoféminité du Logos (androgynie dans mon mémoire). N’oublions pas que je suis l’auteur d’un article sur la masculoféminité d’Adam. N’oublions pas que j’ai des articles sous presse sur le motif de l’époux et de l’épouse dans le Nouveau Testament, sur la masculoféminité du Christ dans la littérature chrétienne ancienne. Ce sujet m’intéresse au plus haut point (voir aussi ce que je dis dans mes autres billets consacrés à ce papyrus). Mais c’est justement parce que je m’y intéresse que je suis méfiant. Je ne veux pas que le débat et la recherche soient pollués par des trafiquants d’art, des faussaires et des chercheurs sans scrupules qui ne veulent que pousser leur agenda personnel…
Si le papyrus s’avérait authentique, je le placerais bien plus du côté du symbolisme nuptial inspiré du Cantique des cantiques, comme on le lit dans l’Apocalypse de Jean, plutôt que du statu matrimonial de Jésus.
Alors je vis un ciel nouveau et une terre nouvelle, car le premier ciel et la première terre ont disparu et la mer n’est plus.
Et la cité sainte, la Jérusalem nouvelle, je la vis qui descendait du ciel, d’auprès de Dieu, comme une épouse qui s’est parée pour son époux. (Apocalypse de Jean 21. 1-2)
Alors l’un des sept anges qui tenaient les sept coupes pleines des sept derniers fléaux vint m’adresser la parole et me dit :
Viens, je te montrerai la fiancée, l’épouse de l’agneau. (Apocalypse de Jean 21. 9)
L’Esprit et l’épouse disent : Viens !
Que celui qui entend dise : Viens !
Que celui qui a soif vienne,
Que celui qui le veut reçoive de l’eau vive, gratuitement. (Apocalypse de Jean 22. 17)
Depuis vendredi, les médias et la blogosphère s’emballent de nouveau… une semaine avant Pâques! C’est en effet devenu une tradition que de lancer une controverse pendant le carême! Pensons au faux tombeau familial de Jésus, pensons aux faux rouleaux de métal, pensons au manuscrit en syriaque daté du Moyen âge, mais présenté comme plus ancien que les évangiles canoniques et j’en passe. Cette fois-ci, c’est une vieille histoire qui revient dans les médias. J’en avais parlé en septembre 2012 (avec des mises à jour jusqu’au 14 novembre 2013).
Si vous lisez l’anglais, vous avez le dossier scientifique ici, tel qu’il est paru dans le Harvard Theological Review. En cliquant sur l’onglet «Latest issue» les articles s’affichent et vous pouvez les ouvrir et les télécharger en format PDF – en principe, le dernier numéro s’affiche automatiquement.
J’attire votre attention sur les deux articles intitulés : « Accelerated Mass Spectrometry Radiocarbon Determination of Papyrus Samples »
Lisez-les et notez ceci :
Le labo de Harvard date le papyrus entre les années 659 à 869 de notre ère. Le labo de l’Arizona date le papyrus entre les années 405 à 209 AVANT notre ère, ce qui est un non sens!
Les médias ne vous le disent pas et Karen King – la prof de Harvard qui est derrière tout ça – passe bien vite sur la question…
Je note souvent – et je le dis souvent – que la datation au carbone 14 n’est pas une méthode précise, que des facteurs comme la contamination des échantillons – ou du matériel – peuvent jouer des tours. Nous en avons donc encore une fois une illustration!
Mais encore, on a prélevé des miettes de papyrus qui ne comportaient pas de trace d’encre afin de procéder à la datation au carbone 14. L’encre n’a donc pas été datée. L’encre n’a été qu’analysée chimiquement et spectroscopiquement.
D’autre part – et ça c’est une bourde monumentale de la part des médias, le manuscrit de l’Évangile de Jean qui est daté dans les deux articles intitulés « Accelerated Mass Spectrometry Radiocarbon Determination of Papyrus Samples » n’est pas l’original, mais une copie, un exemplaire qui a été daté à titre comparatif. Que d’affirmer que le fragment de papyrus est contemporain de l’époque de la rédaction de l’Évangile de Jean relève du contresens le plus grossier! Et c’est que ce rapportent de nombreux médias! (** Addendum en date du 24 avril, il y a désormais des suspicions autour de ce papyrus de l’Évangile de Jean. Détails ici)
Les médias ne disent pas bien fort non plus que la majorité des spécialistes de l’Antiquité tardive, des papyrologues et des coptologues (des spécialistes de la langue copte) sont d’avis qu’il s’agit d’un faux. (Je vous donne à la fin de ce billet quelques liens d’articles écrits par des vrais spécialistes).
Il est en effet aisé de fabriquer de telles choses à partir d’un bout de papyrus ancien et vierge acheté sur le marché noir (ça se trouve facilement). Plusieurs ont noté que des bouts de phrase de l’édition PDF en ligne de l’Évangile de Thomas (sur le site web de Michael Grondin) qui comporte des fautes qui sont uniques à ce PDF, se retrouvent reproduites dans le papyrus. Ça, c’est un argument de taille qui est minimisé par Karen King. Un argument technique qui est difficile à évaluer de la part du grand public, mais qu’un spécialiste du copte voit très bien. Notons donc ceci : Certains médias affirment n’importe quoi, notamment le Figaro (Mis à jour Publié ) qui écrit que la structure grammaticale permet «de dater l’origine du document entre le VIe et le IXe siècle.» C’est faux!! La structure grammaticale indique au contraire qu’il y a quelque chose qui cloche! (** Note du 14 avril 2014 : Je reçois des questions à ce sujet, si vous lisez l’anglais, lisez ça sur le blog de Alin Suciu; puis ces deux articles de Andrew Bernhard 1; Andrew Bernhard 2 – ces articles comportent des citations en copte)
Autre faux détail mentionné dans le Figaro : «Aucun évangile ne mentionne le fait que Jésus ait été marié ou ait eu des disciples féminines» C’est faux! Les évangiles canoniques mentionnent ceci :
Or, par la suite, Jésus faisait route à travers villes et villages ; il proclamait et annonçait la bonne nouvelle du Règne de Dieu. Les Douze étaient avec lui, et aussi des femmes qui avaient été guéries d’esprits mauvais et de maladies : Marie, dite de Magdala, dont étaient sortis sept démons, Jeanne, femme de Chouza, intendant d’Hérode, Suzanne et beaucoup d’autres qui les aidaient de leurs biens. (Évangile selon Luc 8. 1-3)
Jésus lui dit : « Marie. » Elle se retourna et lui dit en hébreu : « Rabbouni » – ce qui signifie maître. Jésus lui dit : « Ne me retiens pas ! car je ne suis pas encore monté vers mon Père. Pour toi, va trouver mes frères et dis-leur que je monte vers mon Père qui est votre Père, vers mon Dieu qui est votre Dieu. » Marie de Magdala vint donc annoncer aux disciples : « J’ai vu le Seigneur, et voilà ce qu’il m’a dit. » (Évangile selon Jean 20. 16-18)
Comme ils étaient en route, il entra dans un village et une femme du nom de Marthe le reçut dans sa maison. Elle avait une sœur nommée Marie qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole. Marthe s’affairait à un service compliqué. Elle survint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien que ma sœur m’ait laissée seule à faire le service ? Dis-lui donc de m’aider. » Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. C’est bien Marie qui a choisi la meilleure part ; elle ne lui sera pas enlevée. » (Évangile selon Luc 10. 38-42)
La journaliste du Figaro nous laisse une impression floue… Comme si elle n’aurait fait que reproduire ce qui se colporte et se grapille sur le web. A-t-elle lu le dossier scientifique et s’est-elle documentée? Ça manque de sérieux…
Mais encore plus tendancieux de la part des médias, c’est que Karen King elle-même dit dans la conclusion de son long article, celui qui est intitulé : « “Jesus said to them, ‘My Wife…’” : A New Coptic Papyrus Fragment » (à la page 158 ) :
«The most historically reliable early Christian literature is silent about Jesus’s marital status, and the GJW fragment does not change that situation. It is not evidence that Jesus was married».
(GJW fragment = le bout de papyrus en question)
Traduction :
«La littérature chrétienne primitive la plus historiquement fiable est silencieuse sur l’état matrimonial de Jésus, et le fragment GJW ne change rien à cette situation. Il ne prouve pas que Jésus était marié ».
Karen King pense même désormais que le fragment, s’il est authentique, aurait pu subir l’influence d’un milieux islamique. On est donc assez loin d’un texte contemporain de l’Évangile de Jean qui parle de la conjointe de Jésus! À la page 159, elle écrit :
«In January 2014, I concluded this article by stating it would not be the last word on the subject. And now in early March, I received news of the results of the second radiocarbon testing of the material artifact of GJW that gives it a mean date of 741 c.e. This date suggests a new line of inquiry into the context of the fragment’s circulation in Egypt of the Islamic period, given the Qur’an’s designation of Jesus as “Son of Mary” and its view that prophets (among whom Jesus is numbered) were usually married, although the Qur’an does not state specifically that Jesus was married.»
Traduction :
« En Janvier 2014, je concluais cet article en déclarant qu’il ne constituerait pas le dernier mot sur ce sujet. Et maintenant, début Mars, j’ai reçu des nouvelles des résultats du deuxième test au radiocarbone de l’artefact matériel de GJW qui lui attribue une date moyenne de 741 de notre ère. Cette date indique une nouvelle piste de recherche (a new line of inquiry) sur le contexte de la circulation du fragment en Égypte pendant la période islamique, compte tenu de la désignation de Jésus dans le Coran comme « Fils de Marie » et son point de vue à l’effet que les prophètes (parmi lesquels Jésus est compté – selon l’Islam) étaient généralement mariés, bien que le Coran ne précise pas que Jésus était marié. »
Les médias qui parlent d’un papyrus contemporains de l’Évangile de Jean disent vraiment n’importe quoi… En aucun moment Karen King n’a suggéré une telle conclusion. Ce manque de rigueur est injustifiable et inacceptable, mais ne me surprend guère.
Je me permets aussi de me vous renvoyer à ce que je disais le 18 sept. 2012 : L’idée d’une épouse du Christ est documentable dans la littérature chrétienne ancienne. Il ne s’agit pas d’un mariage dans le monde matériel, mais d’une symbolique nuptiale inspirée du Cantique des cantique. C’est la même thématique qui est sous entendue dans l’Apocalypse de Jean. Je cite :
Alors je vis un ciel nouveau et une terre nouvelle, car le premier ciel et la première terre ont disparu et la mer n’est plus.
Et la cité sainte, la Jérusalem nouvelle, je la vis qui descendait du ciel, d’auprès de Dieu, comme une épouse qui s’est parée pour son époux. (Apocalypse de Jean 21. 1-2)
Alors l’un des sept anges qui tenaient les sept coupes pleines des sept derniers fléaux vint m’adresser la parole et me dit :
Viens, je te montrerai la fiancée, l’épouse de l’agneau. (Apocalypse de Jean 21. 9)
L’Esprit et l’épouse disent : Viens !
Que celui qui entend dise : Viens !
Que celui qui a soif vienne,
Que celui qui le veut reçoive de l’eau vive, gratuitement. (Apocalypse de Jean 22. 17)
Ce qui m’amène à poser la question sous un angle sociologique, plutôt qu’historique (ou chimique!). Pourquoi les médias ne s’intéressent-ils qu’à ce qui est subversif? Pourquoi les médias inventent-ils autant? Pourquoi certains journalistes sont-ils satisfaits lorsqu’ils publient des brouillons? Où sont nos véritables journalistes d’enquête? Pourquoi les médias ont-ils occulté certains détails importants des résultats de la datation au carbone 14? Pourquoi avoir autant ergoté en disant que le papyrus est contemporain de l’Évangile selon Jean, ou en affirmant que les évangiles canoniques ne parlent pas de femmes disciples ou en exagérant le tout en affirmant, au-delà des conclusions de Karen King, que nous avons désormais la preuve que Jésus était marié? Pourquoi un Jésus marié est-il si important pour notre époque? Pourquoi la période précédant Pâques est-elle si propice à ce genre de publications et à un certain manque de discernement et d’esprit critique? À chaque mois il se découvre pourtant des manuscrits bibliques anciens (pensons aux papyrus d’Oxyrhynque), il se découvre des manuscrits d’oeuvres classiques (tels Homère, Platon et d’autres) et c’est en général publié dans des revues académiques, mais dans l’indifférence totale de la part des médias. Je vous invite à lire à ce sujet la lettre ouverte de Brice C. Jones (le lien est au bas de la page).
J’ajoute aussi, en terminant, que nous déplorons régulièrement la montée d’une certaine pensée dite “conspirationiste” alors que certains voient des complots partout et s’imaginent que les médias sont complices d’une machination destinée à tromper les honnêtes gens. À lire le Figaro et d’autres médias et leur manière de traiter cette nouvelle, ça me laisse perplexe, ça me dit que certains médias s’amusent avec le public (en sont-ils conscients?) et nous prennent pour des gourdes. Un peu de rigueur SVP… Du respect aussi pour vos lecteurs.